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Michel Eddé Grand Officier de la Légion D’Honneur
2012-09-27
Distinction L’hommage de la France à « un homme à la stature unique » dont l’action a permis à la francophonie « d’être synonyme d’avenir ».

C’est à « un Libanais remarquable et un Français de cœur d’exception » que l’ambassadeur de France, Patrice Paoli, a remis hier soir les insignes de grand officier de la Légion d’honneur, une distinction rare mais qui, dans le cas de Michel Eddé, « un homme à la stature unique au Liban », rejaillit en honneur sur l’ordre même qui lui est conféré. 

Au cours d’une cérémonie qui a été « un moment d’amitié, de reconnaissance et de fraternité », et devant un parterre de brillantes personnalités représentatives du grand cercle d’amis dont Michel Eddé a su s’entourer, sa vie durant, Patrice Paoli a remis à son destinataire la belle et grande étoile argentée, après un discours dans lequel il a dit « son bonheur » d’élever à la dignité de grand officier de la Légion d’honneur « un homme qui est tout à la fois un Libanais remarquable et un Français de cœur d’exception ».

Une famille illustre 

« Vous appartenez, cher Michel Eddé, à une famille dont les liens affectifs avec la France remontent à plusieurs générations », a affirmé M. Paoli. 

L’ambassadeur de France ne croyait pas si bien dire. Dans son discours de remerciements, Michel Eddé devait étonner et faire sourire l’ambassadeur – et l’assistance – en précisant que son grand-père, dont il porte le nom, avait été décoré de la Légion d’honneur... il y a 115 ans, par le président Félix Faure en vertu d’un décret du 21 juillet 1897. 

Évoquant le parcours politique de Michel Eddé, l’ambassadeur de France a souligné combien, dans ses différentes fonctions ministérielles, il a œuvré pour resserrer les liens entre le Liban et la France, et faire en sorte que « la francophonie au Liban, comme dans le reste du monde, soit synonyme d’avenir ». 

Au nombre des réalisations dont Michel Eddé a été crédité par l’ambassadeur figurent l’installation du câble sous-marin entre Beyrouth et Marseille (1966) et l’adoption du système français de télédiffusion Secam par la télévision de l’État.

Le patron de presse n’a pas été oublié. « Vous avez assuré la pérennité de la presse francophone quotidienne en rachetant en 1990 L’Orient-Le Jour, ce quotidien de référence. Avec énergie et efficacité, en vous entourant d’une équipe talentueuse et motivée, a affirmé Paoli. (...) Quel vecteur pour la langue française, jour après jour, pour tous les Libanais ! Vous avez également acquis l’hebdomadaire Le Commerce du Levant, qui est maintenant, avec L’Orient-Le Jour, une preuve vivante du succès de la presse en langue française. »
 
L’humaniste

Les qualités d’humaniste et l’engagement de Michel Eddé envers les maronites ont été relevées, que ce soit à son élection à la présidence de la Ligue maronite (2003-2007), ou en sa qualité de président de la Fondation maronite dans le monde. 

Mais Patrice Paoli a su montrer comment Michel Eddé, « en homme de dialogue et de concorde », de l’avis de tous, n’a pas été « prisonnier de cet engagement », mais a su le mettre à profit pour « établir des ponts avec tous vos compatriotes de toutes les communautés ». 

« Cette ouverture d’esprit (...) vous a donné une stature unique au Liban, celle d’un grand humaniste, celle d’une référence et d’un modèle à suivre pour les nouvelles générations », a-t-il dit. 

M. Paoli a ensuite évoqué le rôle joué par Michel Eddé, depuis dix ans, pour faire revivre la Société d’entraide de la Légion d’honneur et soutenir l’association Une Lumière au Levant, fondée par le général Grillot, grand-croix de la Légion d’honneur. 
« La générosité est un trait de famille », a-t-il lancé, évoquant le souvenir d’une mère qui, en 1941, distribuait de la nourriture au voisinage, lors du blocus des côtes libanaises par les navires anglais.

Et rappelant combien en francophile absolu, Michel Eddé connaît par cœur les couplets les moins connus de la Marseillaise, mais aussi Sambre-et-Meuse ou La Madelon, Patrice Paoli a conclu : « Michel Eddé, au nom du président de la République et en vertu des pouvoirs qui nous sont conférés, nous vous élevons à la dignité de grand officier de la Légion d’honneur. »
 

Les Libanais, libres et fiers...

Dans son discours de remerciements, Michel Eddé a rappelé, dans les termes inoubliables d’un « géant de l’histoire », le général de Gaulle, les « liens uniques “ tissés entre les Libanais et les Français ” tout au long des siècles ».

« Chers amis, a-t-il dit, le général de Gaulle qui était arrivé à Beyrouth, après la défaite des troupes de Vichy au Liban, s’était adressé aux Libanais le 27 juillet 1941 au Cercle de l’Union française en ces termes : “Dans tout cœur de Français digne de ce nom, je puis vous dire que le nom seul du Liban fait remuer quelque chose de très particulier et j’ajoute que c’est d’autant plus justifié que les Libanais, libres et fiers, ont été le seul peuple dans l’histoire du monde, à travers les siècles, quels qu’aient été les péripéties, les malheurs, les bonheurs, les destins, le seul peuple dont, jamais, aucun jour, le cœur n’a cessé de battre au rythme du cœur de la France...” » 

« Les Libanais n’ont jamais cessé de manifester les liens qui les attachent à la France », a enchaîné Michel Eddé, qui a rapporté comment, en 1941, des volontaires avaient intégré les Forces françaises libres et s’étaient battus à Bir Hakim, ainsi que sur divers théâtres d’opérations de la Seconde Guerre mondiale, et comment sa propre mère et la plupart des dames des quartiers d’Achrafieh, de Saïfi et de Rmeil « avaient passé des nuits en prière » quand les nazis étaient entrés à Paris, en 1940, ou quand les troupes françaises étaient encerclées par le Vietminh à Dien Bien Phu, en 1954. Ou encore comment, à la mort de Charles de Gaulle, en 1970, un deuil national de 7 jours avait été décrété au Liban.

« Nous partageons avec la France les mêmes valeurs, les mêmes principes et les mêmes idéaux de liberté, de justice et de démocratie, a insisté Michel Eddé. Notre système est le seul système démocratique de toute la région. Notre pays est le seul à n’avoir jamais connu ni la dictature ni les coups d’État militaires (...). Je ne nie pas que la corruption, la concussion, la prévarication, le clientélisme et le népotisme sont malheureusement courants dans notre pays. Mais ceci est la conséquence d’une mauvaise pratique de la vie politique et non pas la faute de notre système politique. Ce qui nous manque, c’est l’État de droit, que nous avons déjà tenté d’instaurer sous les régimes des présidents Fouad Chehab, Charles Hélou et Élias Sarkis en particulier, sans résultat jusqu’à présent. Mais ceci doit demeurer notre but principal, si nous voulons préserver nos principes, nos idéaux et notre liberté. » 

M. Eddé a conclu son mot en adressant ses remerciements aux présidents Nicolas Sarkozy et François Hollande.


Discours de l’ambassadeur de France, Patrice Paoli

 Madame et Messieurs les Ministres,
 Messieurs les députés,
 Monseigneur Joseph Mouawad, représentant Sa Béatitude le Patriarche Bechara Rai,
 Mesdames et Messieurs,
 Chers amis,
 
C’est une grande joie – je devrais même dire un grand bonheur, et je mesure le sens des mots - de vous accueillir ce soir à la Résidence des Pins, lieu chargé d’histoire, lieu symbolique dans la relation d’amitié entre la France et le Liban. Elle est certainement l’endroit le plus approprié pour célébrer l’élévation à la dignité de grand officier de la Légion d’Honneur d’un homme qui est tout à la fois un Libanais remarquable et un Français de cœur d’exception.
 
Cher Michel Eddé,
 
L’élévation à la dignité de grand officier de la Légion d’Honneur est une distinction rare. Je suis intimidé et impressionné, car c’est la première fois que j’ai l’honneur de remettre une distinction si élevée -il faut un début à tout- et il n’y a pas de hasard, puisque c’est à vous, cher Michel Eddé, que je vais la remettre. Elle témoigne de l’affection et de la reconnaissance que vous porte la France. Elle est à l’image de l’affection que vous-même portez à notre pays et de votre action tout au long de votre longue et éminente carrière. Pour moi, je le dis très simplement, cette réunion est avant tout, grâce à vous, un moment d’amitié, de reconnaissance et de fraternité. Nous n’avons pas pu inviter tous vos amis, la Résidence des Pins n’aurait pas suffi à les accueillir. Mais je voudrais adresser un salut amical à tous nos invités ce soir, que je remercie d’être venus. Ce n’est pas évident pour tous, je mesure le prix de vos présences. Je pense aussi à ceux qui n’ont pas pu venir.
 
J’évoquais à l’instant votre longue et éminente carrière. Il est bien difficile de la résumer en quelques mots, mais je dois suivre les rites. Je vais donc évoquer votre parcours et vos engagements, en m’efforçant à la concision (sinon nous y passerons toute la nuit, tant votre parcours est riche !). Pardonnez-moi par avance, chers amis, mes oublis et omissions comme mes longueurs.
 
Vous appartenez, cher Michel Eddé, à une famille dont les liens affectifs avec la France remontent à plusieurs générations, une famille illustre qui a donné au Liban un président de la république et qui s’est constamment tenue aux côtés de notre pays.
 
Vous portez particulièrement bien ce lourd héritage, puisque vous avez vous-même été plusieurs fois ministre entre 1962 et 1998 – et à quels postes prestigieux, notamment l’éducation et l’enseignement supérieur et la culture, dans les gouvernements de Chafic Wazzan et Rafiq Hariri ! Vous y avez naturellement servi d’abord votre pays, mais vous avez œuvré aussi, dans vos différentes fonctions, au resserrement des liens entre nos deux pays et au renforcement de la francophonie.
 
Votre première expérience ministérielle remonte à 1966, lorsque vous avez eu le portefeuille des télécommunications et de l’information dans le gouvernement de Rachid Karamé. Vous y avez alors joué un rôle essentiel dans les négociations qui ont abouti à l’installation du câble sous-marin entre Beyrouth et Marseille – alors en concurrence avec d’autres projets. Vous avez également pesé pour l’adoption du système français de télédiffusion Secam  par la télévision de l’Etat.
 
Le gouvernement français vous avait alors, en signe de reconnaissance et d’estime, nommé commandeur de la Légion d’Honneur.
 
Je sais par ailleurs que, enfant et jeune homme,  vous avez pleuré les malheurs de la France et prié pour elle, notamment pour que nos soldats ne connaissent pas la défaite à Dien Bien Phu. Je ne sais pas si nos compatriotes ont eu toujours les mêmes attentions.
 
Toute votre vie, vous avez été sans faiblir engagé dans la promotion de la francophonie. C’est incontestablement à vous que l’on doit le maintien et le renforcement d’une bonne part de la presse d’expression française au Liban.
 
Ainsi, vous avez assuré la pérennité de la presse francophone quotidienne en rachetant en 1990 L’Orient-Le Jour, ce quotidien de référence, né en 1970 de la fusion des grands quotidiens L’Orient et Le Jour créés respectivement en 1923 et en 1935. Comment ne pas rendre hommage à cette occasion à Gabriel Khabbaz, Georges Nacache, et Michel Chiha, leurs fondateurs.
 
Lorsque vous l’avez repris, L’Orient-Le Jour avait autant souffert que le Liban des quinze années de guerre. Avec énergie et efficacité, en vous entourant d’une équipe talentueuse et motivée, vous avez réussi à le hisser en vingt ans à une des premières places des quotidiens libanais. Quel chemin parcouru ! Et quel vecteur pour la langue française, jour après jour, pour tous les Libanais !
 
Vous avez également acquis l’hebdomadaire Le commerce du Levant, qui est maintenant, avec L’Orient-Le Jour, une preuve vivante du succès de la presse en langue française.  Depuis, votre groupe de presse s’est diversifié et publie maintenant des suppléments mensuels en français qui ont beaucoup de succès (je pense par exemple à L’Orient Littéraire, à Junior Campus, à Santé et Beauté), redonnant à la presse francophone la place qu’elle avait perdue et gagnant même du terrain auprès de nouveaux lectorats.
 
Cher Michel Eddé,
 
Conjointement à ce rôle dans la presse, vous avez, comme ministre de la culture et de l’enseignement supérieur, œuvré sans faillir pour maintenir la langue française comme première langue étrangère pratiquée dans l’enseignement, de la maternelle jusqu’au plus haut niveau universitaire. Vous avez même obtenu son renforcement à l’Université Libanaise, principale université du pays avec plus de 70 000 étudiants.
 
Je crois savoir par ailleurs que c’est en bonne part sur votre intervention auprès de la mission laïque française qu’un lycée français a été ouvert dans la région de Nabatiyeh. Enfin, fidèle à vos convictions à l’égard de tous les Libanais, vous avez aussi beaucoup œuvré pour que l’université Saint-Joseph puisse ouvrir un campus à Tripoli.
 
A travers ces multiples initiatives, vous avez donc puissamment contribué à renforcer la qualité et la part du français aux différents niveaux du système d’éducation et d’enseignement au Liban, et c’est évidemment essentiel pour favoriser la diffusion de la langue française dans les nouvelles générations et faire en sorte que la francophonie au Liban, comme dans le reste du monde, soit synonyme d’avenir.
 
Cher Michel Eddé,
 
Vous êtes aussi un humaniste et un homme d’engagement au sein de votre communauté et envers tous les Libanais.
 
Ainsi, vous avez mis votre expérience et votre connaissance des hommes au service de la communauté maronite, lorsque vous avez été élu président de la Ligue maronite, poste que vous avez occupé de 2003 à 2007. Vous êtes aujourd’hui président de la Fondation maronite dans le monde, que vous avez contribué à créer, et vous vous y illustrez par une action en faveur des personnes démunies.
 
Mais vous n’avez pas été prisonnier de cet engagement, bien au contraire, vous l’avez mis à profit pour établir des ponts avec tous vos compatriotes de toutes les communautés. Vous avez en effet toujours été ouvert aux autres, un homme de dialogue et de concorde entre toutes les communautés et les confessions. Vous avez ainsi toujours cherché à servir l’idéal qui est le vôtre, celui d’un Liban indépendant, fort de sa diversité, de son identité culturelle multiple et de son plurilinguisme, mais fort aussi de sa proximité avec la France.
 
Cette ouverture d’esprit, les relations que vous avez nouées avec tous les responsables confessionnels et politiques, vous ont donné une stature unique au Liban, celle d’un grand humaniste, celle d’une référence et d’un modèle à suivre pour les nouvelles générations.
 
Je sais que vos enfants, qui réussissent brillamment dans un registre professionnel différent, suivent aujourd’hui avec vous ce chemin d’ouverture et de paix.
 
Cher Michel Eddé,
 
Je voudrais enfin évoquer aussi votre rôle, depuis dix ans, pour faire revivre la Société d’Entraide de la Légion d’Honneur. Vous avez dans ce cadre soutenu personnellement les membres de l’ordre décorés pour fait de guerre dont beaucoup vivent dans des conditions difficiles. Vous avez également soutenu l’association « Une Lumière au Levant »,  fondée par le Général Grillot, grand croix de la Légion d’Honneur, et dont l’objectif est de rassembler les enfants de toutes les communautés religieuses du Liban autour de la langue française.
 
Là encore, vous voilà le porteur de votre héritage familial. Je ne voudrais pas raconter votre vie à votre place, mais je sais que votre mère distribuait en 1941, alors que les Britanniques avaient établi un blocus des côtes libanaises et que le spectre de la famine de la première guerre mondiale hantait les esprits, de la nourriture à tout son voisinage. La générosité est donc un trait de famille !
 
Cher Michel Eddé,
 
Je voudrais finir par un clin d’œil, en évoquant un de vos talents qui montre à quel point votre lien avec la France est intime ; je veux évoquer votre connaissance pointue de la chanson française.
 
Je sais que beaucoup ici vous ont entendu, admiratifs, chanter les couplets les moins connus de la Marseillaise, mais aussi Sambre-et-Meuse ou La Madelon – en réalité comme peu de Français savent le faire aujourd’hui. Je suis persuadé que vous saurez encore nous surprendre.
  
Michel Eddé, au nom du Président de la République et en vertu des pouvoirs qui nous sont conférés, nous vous élevons à la dignité de Grand Officier de la Légion d’Honneur./.
 
Allocution de S.E. M. Michel Eddé

Monsieur l’Ambassadeur,
Chers amis,

Le Général de Gaulle qui était arrivé à Beyrouth, après la défaite des troupes de Vichy au Liban, s’était adressé aux libanais le 27 juillet 1941 au Cercle de l’Union Française en ces termes :
« Dans tout cœur de Français digne de ce nom, je puis vous dire que le nom seul du Liban fait remuer quelque chose de très particulier, et j’ajoute que c’est d’autant plus justifié que les Libanais, libres et fiers, ont été le seul peuple dans l’histoire du monde, à travers les siècles, quels qu’aient été les péripéties, les malheurs, les bonheurs, les destins, le seul peuple dont, jamais, aucun jour, le cœur n’a cessé de battre au rythme du cœur de la France… ».
 
Dans la bouche de ce Géant de l’histoire, ces paroles résument les liens uniques qui ont caractérisé les relations entre la France et le Liban tout au long des siècles.

Sans vouloir remonter au XVIème  siècle, au Roi François 1er, et au traité des Capitulations conclu par ce dernier avec l’Empire Ottoman en vue de préserver les droits des chrétiens dans cet Empire, ni rappeler qu’en 1860 l’Empereur Napoléon III avait envoyé au Liban un corps expéditionnaire sous le commandement du Général de Beaufort d’Hautpoul pour mettre un terme aux opérations meurtrières suscitées par les Ottomans et qui avaient ensanglanté notre pays, je voudrais souligner quelques événements plus proches de nous qui marquent l’amitié et même l’affection que les français portent au Liban et aux libanais.

Tout au long de la guerre du Liban, des dizaines de groupes de Français, comptant jusqu’à vingt ou trente personnes chacun, en provenance de diverses villes et régions Françaises telles que Nancy, Metz, Paris, Bordeaux, Grenoble, Toulouse et Nice, sont venus régulièrement dans notre pays au siège des Moines Libanais à Kaslik, ou chez les pères Antonins ou à Saint Charbel à Annaya, et dans d’autres lieux, pour manifester, au risque de leur vie, leur solidarité et leur soutien aux libanais.

Par ailleurs, en 1983, et après les événements tragiques de la Montagne, le Président Hélou m’avait demandé de participer avec lui et Mademoiselle Antoinette Kazan à la fondation de l’Association des « Amis des Restaurants du Cœur ». Dès cette époque cette Association a reçu un soutien matériel important de la part de nombreux français représentés par le Général de Chizelles, le Général de Dinechin et l’Ambassadeur Monsieur Husson. Par ailleurs, le Général Georges Grillot, qui est le général le plus décoré de l’Armée Française et titulaire de la Grand Croix de la Légion d’Honneur à titre militaire a fondé une association sous le nom de « Une Lumière au Levant » qui ne cesse de collecter des fonds en France et d’aider à la construction d’écoles dans toutes les régions du Liban, druzes, maronites, chiites et sunnites. Je regrette que, pour des raisons de santé, il ne soit pas aujourd’hui parmi nous.

De leur côté, les libanais n’ont jamais cessé de manifester les liens qui les attachent à la France.

Durant l’année 1941, de nombreux libanais de toutes confessions, répondant aux souhaits du Général de Gaulle, avaient intégré les Forces Françaises Libres et avaient participé en 1942 à la bataille de Bir Hakim sous les ordres du Général Koenig contre le Général Rommel. De même qu’ils ont combattu pour la France tout au long de la guerre, sur la plupart des théâtres d’opérations sous les ordres du Général Leclerc et du Maréchal de Lattre de Tassigny.

Par ailleurs, lorsque les troupes allemandes sont entrées à  Paris le 14 juin 1940 puis plus tard le 7 mai 1954, lorsque le camp retranché de Dien Bien Phu commandé par le Colonel de Castries est tombé aux mains des Vietminh commandés par le Général Vo Nguyen Giap, je me souviens que ma mère et la plupart des dames de Beyrouth des quartiers d’Achrafieh, Saifi et Rmeil avaient passé des nuits en prières dans les Eglises à l’intention de la France. Et lorsque le Général de Gaulle est décédé le 9 novembre 1970, le gouvernement libanais avait décrété un deuil national de sept jours et le Président de la République, le Président de la Chambre et le Président du Conseil ainsi que l’ensemble des Ministres s’étaient rendus à Paris pour assister à la messe des funérailles à Notre Dame de Paris.
Nous partageons avec la France les mêmes valeurs, les mêmes principes et les mêmes idéaux de Liberté, de Justice et de Démocratie. Notre système est le seul système démocratique de toute la région. Notre pays est le seul à n’avoir jamais connu ni de Dictatures, ni de coups d’Etat militaires, et nous sommes farouchement attachés à la liberté de la Presse, à la liberté de Parole, à la liberté de Conscience, de même que nous tenons fermement à préserver la Démocratie dans notre pays, c’est-à-dire le Droit à la Différence, le Respect de l’Autre et l’Acceptation de l’Autre dans sa Différence.

Je ne nie pas que la corruption, la concussion, la prévarication, le clientélisme et le népotisme sont malheureusement courants dans notre pays. Mais ceci est la conséquence d’une mauvaise pratique de la vie politique, et non pas la faute de notre système politique. Ce qui nous manque c’est l’Etat de Droit que nous avons déjà tenté d’instaurer sous les régimes des Présidents Fouad Chéhab, Charles Hélou et Elias Sarkis en particulier, sans résultat jusqu’à présent. Mais ceci doit demeurer notre but principal, si nous voulons préserver nos principes, nos idéaux et nos libertés.

Monsieur l’Ambassadeur,

Lorsqu’en fin 1967 le Général de Gaulle avait décidé de m’accorder la Cravate de Commandeur de la Légion d’Honneur, j’ai eu un moment d’intense satisfaction, d’autant plus que mon grand-père Michel Eddé avait été décoré il y a 115 ans de la Légion d’Honneur par le Président Félix Faure en vertu d’un décret du 21 juillet 1897.

Maintenant que vous venez de me remettre la plaque de Grand Officier de la Légion d’Honneur, je ressens que c’est un grand moment de ma vie et je vous en remercie de tout cœur. De même que je vous prie de transmettre mes remerciements au Président Nicolas Sarkozy et au Président François Hollande de m’avoir décerné cette très haute distinction.

Je n’oublie pas Madame la Sénatrice Christiane Kammerman et le Général Georges Grillot qui ont œuvré de leur côté pour l’obtention de cette décoration et qui n’ont pas pu être aujourd’hui parmi nous. Je les remercierai moi-même de vive voix.

Merci à tous.

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